Matoufilou

« L'une des dĂ©chirures propres Ă  la poĂ©sie », c'est que, « ce qui est devant moi, au moment oĂ¹ je le dis, il faut justement qu'il ne soit plus. Les objets soumis Ă  l'Ă©preuve du poème, pour pouvoir briller d'un vif Ă©clat, doivent cesser d'Ăªtre ce qu'ils sont pour devenir langage. » Avec ce paradoxe que « dans le mĂªme temps le langage les sauve et les porte Ă  leur Ăªtre. » (Fabrice Midal, Pourquoi la poĂ©sie ? L'HĂ©ritage d'OrphĂ©e, Pocket, 2010). Lisant cela, je songe Ă©galement Ă  la photo, oĂ¹ c'est le mĂªme principe : ce qui a Ă©tĂ© pris en photo (l'objet de la prise de vue) n'est dĂ©jĂ  plus, est devenu langage. Et cependant c'est par ce langage qu'il existe, et qu'il prend Ă©ventuellement une existence nouvelle, devient, pour reprendre une expression dĂ©sormais galvaudĂ©e, une rĂ©alitĂ© « augmentĂ©e ». Ce paradoxe confirme le cousinage (Ă  mes yeux du moins) de la photo et de la poĂ©sie. La « dĂ©chirure » propre Ă  la photo, c'est qu'elle ne fait exister son objet qu'en le faisant disparaĂ®tre.
12 Commentaires
  1. SĂ©rieux motif de rupture ! MĂªme en ombre chinoise.

  2. Comme HR ! Il n’y a pas pire que l’inattention. Pourtant, elle en faisait un maximum.
    Ou… elle faisait un selfie ? On n’es jamais si bien servi…etc

  3. Charmante opposition !

  4. J’aime bien ces silhouettes mais je crois que j’aurai contrastĂ© plus l’image et que j’aurai recadrĂ© pour Ă©liminer une partie de la base sombre …

  5. Opposition de charme, la mère qui tourne le dos Ă  sa fille, tout cela temporairement et pour la bonne cause, la photo. J’ai trouvĂ© amusante cette opposition Ă  la fois de style, de matĂ©riel, et bien sĂ»r de sujet : d’un cĂ´tĂ©, je photographie le monde, de l’autre je me photographie, moi.
    Ce n’est plus un fossĂ©, c’est un abĂ®me entre deux gĂ©nĂ©rations.

  6. Et le nombre d’or, Estienne, qu’en fais-tu ? Tu es le premier pourtant Ă  en faire bon usage… Si je recadre, je perds l’Ă©quilibre, non, et les deux personnages avec moi ?

  7. Je ne pensais pas au nombre d’or, je vois plutĂ´t presque un panoramique. Je ne suis pas “bon en calcul”, je ne rĂ©agis qu’au ressenti et lĂ , je trouve la composition “lourde” d’oĂ¹ ma rĂ©flexion. Mais tu restes totalement maĂ®tre de ton image ! đŸ™‚

  8. Merci Estienne. Et je te rassure, je n’ai pas non plus de calculette dans la tĂªte, je suis comme toi plutĂ´t dans la sensation. L’Ă©quilibre dont je parle ici, oĂ¹ participent la part de noir et la pente, naĂ®t d’abord d’un ressenti.

  9. L’idĂ©e est bonne et bien mise en forme avec ce fort contraste.
    Mais l’image aurait eu plus de force si les 2 photographes avaient Ă©tĂ© rapprochĂ©s, presque dos Ă  dos. Ce qui aurait eu pour bĂ©nĂ©fice d’Ă©liminer cette surface noire et vide.
    Ce n’est qu’un avis.

  10. Merci GB, je reconnais bien-lĂ  le brillant metteur en scène de ses propres images, Ă  la manière d’un cinĂ©aste. Je n’ai hĂ©las pas ton talent pour recrĂ©er une vue Ă  partir de l’existant. Puis j’aime bien ici cette distance entre les deux personnages, ce vide qui se creuse, cet Ă©cart qui s’accentue entre les deux Ă¢ges…
    J’entends vos remarques, mais elles me confirment plutĂ´t dans l’idĂ©e que cette vue me plaĂ®t telle qu’elle est, avec ses imperfections et ses beautĂ©s.

  11. Bien sĂ»r Matoufilou, ce n’Ă©tait qu’un avis et ta photo est bien comme ça.
    Si on faisait tous les mĂªmes cadrages, quelle tristesse ce serait !

  12. Bien vu!

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