En 1965, Pierre Bourdieu dirigeait un ouvrage collectif intitulé: “Un art moyen. Essai sur les usages sociaux de la photographie” .

On pouvait notamment y lire :”Les raisons mêmes qui détournent la classe cultivée de la photographie, peuvent … incliner certains membres des classes moyennes à y rechercher le substitut, à leur portée, des pratiques consacrées qui leur restent inaccessibles.”

Près de 50 ans plus tard, avec ces photos prises une dizaine d’années plus tôt,  on découvre qu’il parlait d’expérience. Dans les propos qui accompagnent l’exposition  on peut même comprendre que que cette pratique a joué un rôle dans sa formation à la sociologie.




Monsieur HR

Né en 1949, habite Tours (37), retraité et syndicaliste Je dirais bien que j'aime mettre mon "grain de sel" mais cette expression est déjà utilisée (à bon escient) par un autre photographe sur le blog . Je pratique la photo en pointillé, de manière un peu erratique, sans véritable style personnel nettement défini, avec un petit goût pour le flou, souvent mal maîtrisé d'ailleurs J'éprouve un vrai plaisir à dialoguer sur le blog et je pense que ma pratique, notamment celle du post traitement informatique de la photo s'est améliorée grâce à ces échanges
6 Commentaires
  1. Ah ce Bourdieu! Aujourd’hui, on ne pourrait pas reprendre pas intégralement ce qui est dit dans son “Art moyen”, parce que le monde de la photographie a été chamboulé. Ses photos d’Algérie sont sympathiques, mais ses commentaires sont parfois totalement à côté de la plaque…Mais la citation colle bien aux photographes amateur que nous sommes: ne serait-elle pas une définition de LVG?

  2. Même “à côté de la plaque” Bourdieu a le mérite d’ouvrir la réflexion sur des sujets qui dérangent: Les Héritiers, La Reproduction. Éléments pour une théorie du système d’enseignement , La Distinction. Critique sociale du jugement ,La misère du monde,« La domination masculine » etc etc…
    Ses photos d’Algérie ne sont pas seulement sympathiques. Elles ont un pouvoir de constat et de dénonciation qui méritent qu’on s’y attarde.
    Je ne suis pas certaine que la photo soit un substitut à quoi que ce soit… Cela impliquerait déjà une adhésion à des valeurs hiérarchiques en matière d’art que je considère pour ma part comme obsolètes, nocives , desséchantes. On ne sait jamais ce qui germe dans des formes d’expression qui, parce qu’émergeante nous sont étrangères. A force de créer un carcan , des remparts , d’élever des citadelles pour préserver un art garanti., estampillé , reconnu par toutes les têtes chenues qui sont les quasi seuls publics des conerts etc…)on le préserve de tout ce qui pourrait le vivifier. Le plaisir de la photo est en ce qui me concerne intouché par le regret d’autre chose. Je vois François Cardi que vous avez aperçu mon com un peu impulsif qui vous demandait de quelle hauteur vous parliez pour condescendre à trouver Bourdieu sympathique mais à côté de la plaque. Je n’ai pas lu Bourdieu , comme je n’ai pas lu un tas d’autres auteurs mais je respecte sa démarche qui va gratter des zones enkystées de la société française, ce vieux, terriblement vieux pays.

  3. Franchement, je préfère ce commentaire à celui de tout à l’heure, sans doute parce que la réponse peut être plus claire: je suis en tout point d’accord avec vous sur la photographie et ses capacités à bousculer les hiérarchies culturelles bien installées. Mais je ne suis pas certain que nous en soyons là parce que la photographie est aujourd’hui un marché qui enrichit beaucoup de gens et rarement les photographes. Ce qui n’empêche pas des centaines de photographes de prendre un plaisir pas possible à photographier, à montrer les produits de leurs coups d’oeil et de coeur, en se moquant pas mal du marché…ce qui ne l’empêche pas d’exister pour autant. Ce que Bourdieu n’avait pas vu, c’est l’existence de ce marché, la marchandisation de ce qui est devenu entre temps un art à part entière, parce qu’en 65, il n’avait sous les yeux (plutôt ceux dont il a coordonné les recherches) que quelques photographes professionnels (mode et presse) et une foule d’anonymes, les amateurs, qui pour lui font des photos de famille ou bien affichent des prétentions d’artiste (d’où la citation choisie par Monsieur HR). On voit tout l’écart avec la situation de la photographie aujourd’hui.
    Pour les photographies faites par Bourdieu en Algérie, et son oeuvre en général, vous me faites dire quelque chose que je ne pense pas: ce sont ses commentaires des photographies que je trouve à côté de la plaque, parce qu’il voit des choses qui n’existent pas vraiment dans les photographies, et leur fait dire parfois des choses auxquelles il croit, sans qu’elles les disent clairement. Et venant du plus grand sociologue français, ça m’a toujours surpris.
    Quant à l’oeuvre de Bourdieu, que j’ai pu lire (et enseigner), je vous avouerai que si, pour moi, certains de ses bouquins sont des quasi chefs d’oeuvre ( Les héritiers, La distinction, La misère du monde, par exemple), d’autres mériteraient une sorte d’autocritique (qui a été faite par d’autres d’ailleurs, comme La reproduction, où Bourdieu ne dit jamais d’où il parle) bénéfique pour tout le monde. Il ne l’a pas faite et c’est dommage. Il en est résulté, chez certains, une quasi croyance dans un système intellectuel assez (c’est peu dire) fermé et qui a provoqué chez eux, qui appliquent un schéma explicatif systématique, un assèchement dramatique de la réflexion sociologique.
    Croyez bien que je n’ai aucune attitude condescendante, à l’égard de qui que ce soit, mais que je me réserve un droit et un devoir d’inventaire concernant un Bourdieu que j’ai appris à lire d’une façon critique, précisément pour ne pas être pris dans un système de pensée, par goût de la liberté peut-être…

  4. Il me semble que la citation que j’ai extraite du bouquin voulait signifier que la pratique photographique des “classes moyennes” , d’une part visait à se distinguer, d’une manière quelque peu condescendante, des pratiques et visions culturelles des classes populaires de l’époque (paysans notamment) et d’autre part constituait un substitut en ce que les pratiques culturelles plus “nobles” (comme la peinture) ne leur étaient pas accessibles.
    Qu’en est il de nos pratiques, nous qui aujourd’hui publions, avec pugnacité dans la “vieengris”?
    La hiérarchie des disciplines artistiques a évolué : comment interpréter la ruée d’une partie de ces classes moyennes vers la peinture (à travers l’aquarelle notamment) que Bourdieu considérait comme inaccessible?
    Les pratiques de la photographie ont évolué (l’explosion du téléphone portable). La mercantilisation de l’art est devenue omniprésente comme le souligne François. Les rapports des classes (qui elles mêmes ont évolué. que reste t il des paysans ?)à la culture semblent également s’être transformés. Dans ce contexte ne constituons nous (les photographes, un peu prétentieux mais sympathiques, qui publient sur ce blog) pas une espèce en voie de disparition ?
    Nos publications seraient alors, sans que nous osions nous l’avouer, une manière de mourir en beauté ? Y aura-t-il quelqu’un pour nous regretter ?

  5. Les mécanismes d’inégalité sociale de Bourdieu! Je crois que les contradictions me minent qu’il faut des tuteurs et peut-être des bourreaux pour envisager à faire suivre l’art comme un langage sans frontières de classe sociale.
    De plus le photo reportage disparu en partie et laisse place des photos virtuelles sans foi ni âme.

  6. Au hasard de 5 photos au hasard je tombe sur celle-ci… La chronique du Musée de Tours… C’est bien de nous faire partager vos coups de foudre M.HR…

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *